L'instant du choix
Soulever le problème de la génétique, non sans chercher à s'égarer, est une projection que chaque parent souhaite pour son enfant. On le voudrait parfait, on voudrait lui donner le maximum de chance au départ. Lui transmettre le meilleur de soi tout en «mettant» de côté le moins bon. Un enfant c'est un «projet» bien plus intense que celui d'acheter une maison, mais un projet quand même. Il s'élabore, il se rêve, s'imagine dès l'âge où l'être humain est «capable» de se reproduire. Qui ne rêve pas de l'enfant idéal et finalement «fait avec», l'aime «quand même», les propos sont durs mais si souvent entendus. Un enfant est un désir qui se conçoit et somme toute paraît tout à fait normal, l'inverse serait plus inquiétant et relèverait certainement de l'internement.
Le désir est là, consciemment ou non, qu'il soit un garçon ou une fille. Peut être faudrait-il s'interroger sur les parents qui avant de savoir vous répondent qu'importe le sexe. J'incite d'ailleurs les parents qui se reconnaîtront à s'interroger plus longuement sur cette réalité. La pulsion animale pousse effectivement à la reproduction simple, mais vous parents, votre désir n'a pu se limiter qu'à une simple reproduction. On ne peut en effet concevoir l'être sans lui donner une identité sexuelle, cet aspect est d'ailleurs développé plus loin. Ce désir qui devient plaisir d'avoir un enfant ne peut se stopper là. Il y a construction sexuée du futur petit d'homme. L'ovocyte fécondé possède déjà toute sa carte génétique, y compris le sexe de l'embryon. Ne pas vouloir savoir, n'est ce pas une fuite d'une déception possible. Ce que l'on souhaite n'a selon les probabilités qu'une chance sur deux de se réaliser alors on ne préfère pas prendre le risque de cet «échec» du sexe. Et tout commence là, car déjà inconsciemment on ne peut penser, imaginer son enfant sans le projeter sexué, ce qui permet de ne pas l'assimiler à une chose. On ne fait pas un enfant pour faire un enfant, il y a toute une symbolique qui se greffe autour et c'est cette dernière que l'on tendra à transmettre.
«Si on avait un enfant, on l'appellerait ...», cette phrase fréquente dans notre vocabulaire fait appel à l'imaginaire de l'enfant, celui de l'adulte qui renoue avec ses jeux passés, un peu comme on joue à la poupée ou avec son ours en peluche, ce besoin de nommer ce qui est et dans ce cas précis ce qui sera car telle est la «destinée» de tous. C'est en fait une fausse projection dans le futur. Bien avant la conception, imaginer le prénom d'un enfant, ce n'est pas celui du sien mais de celui qu'on a été, le prénom que l'on aurait pu choisir pour soi.
Dans ses huit premières années l'enfant a d'ailleurs besoin de s'identifier, d'abord avec des animaux, on joue au lion, au chat, au chien et on est tour à tour le lion, le chat, le chien. On retrouve ces jeux d'enfants dans les dessins animés où les héros sont des animaux qui parlent. Chez Walt Disney par exemple, la souris, le canard. Les animaux évoluent au rythme de l'enfant, ils prennent forme humaine (les Cosmocats). Au fur et à mesure qu'il acquiert sa personnalité, qu'il prend conscience de son statut d'être humain puis de sa sexuation, il s'identifie à d'autres hommes. L'enfant s'imagine être un animal et le mime, puis il est le héros qu'il a vu à la télé ou dans les livres. Il est un des «power rangers» après avoir été une des «tortues ninjas». La petite fille est Cendrillon, le garçon mowgli. D'ailleurs sur ce dernier exemple, il s'agit bien là d'une phase de transition, l'enfant est élevé parmi les animaux, il grandit, découvre la réalité puis s'en va rejoindre ses «pareils», le monde des Hommes, des adultes... Souvenez-vous, le petit Mowgli apercevant cette jolie demoiselle au bord de l'eau, il hésite à la rejoindre, attirée par une force mystérieuse (devinez laquelle) et celle de retourner parmi ses amis les animaux. Tiraillé par ce qu'il doit laisser derrière lui, son monde d'enfant, et inexorablement appelé vers le monde des adultes. La démarche logique dans cette histoire est respectée, il accepte de grandir.