La jalousie
Qui pour soi-même voire dans son entourage n’a pas utilisé ce mot : jalousie, à l’adresse de quelqu’un ? Je tiens avant de commencer à apporter une précision. Souvent on confond jalousie et possessivité, ce sont deux concepts bien distincts. La jalousie appartient au domaine de la névrose, elle est une angoisse sur la fidélité de l’autre. La possessivité, névrose également, correspond au besoin d’appropriation de l’autre. La différence tient essentiellement dans ce que l’un est projection, la jalousie, l’autre tient plus d’une problématique à la mère récurrente dans sa relation avec autrui. Cela peut sembler difficile d’approche, mais vous le verrez il n’en est rien.
La jalousie est une angoisse
Mettons en scène un couple : un mari, une femme... Postulons un mari jaloux... Autrement dit chaque occasion est l’objet pour celui-ci d’une théatralisation d’événements... Il imagine sa femme dans d’autres bras, avec un amant... Chaque regard qui se porte sur elle donne lieu à des “scènes de jalousie” : “pourquoi il te regarde ainsi ? qu’est ce que tu lui as fait pour le provoquer ?”, les exemples ne manquent pas et je pense que chacun peut en trouver de par son propre vécu. La jalousie consiste donc à imaginer des situations, des relations, des comportements de l’être aimé avec d’autres personnes. Plus haut je parlais de “projection”, pourquoi ? Certes les propos qui vont suivre vont certainement révulser toute personne jalouse et éclairer d’une manière un peu brutale la “victime” de ces actes de jalousie...
Tout ce que le “jaloux” attribue à l’autre n’est que projection d’un propre désir inconscient. Le mari jaloux, pour reprendre notre exemple, est en fait en proie à des désirs inconscients “d’infidélite”... Ces désirs dans le cadre de la pulsion sont tout à fait fréquents et “normaux”, il ne faut pas confondre : désir et réalisation du désir (voir chapitre du même nom)... Mais cette pulsion inconsciente est insupportable... de par son mode de fonctionnement conscient, éducation, etc. Rendre conscient une telle pulsion par une forme directe apporterait une angoisse et un traumatisme où l’être en question ne pourrait “vivre avec”. La solution qui s’ouvre à lui reste donc la projection : je projète mes propres désirs inconscients sur l’autre. Finalement tout ce qui est attribué à l’autre est le reflet d’une pulsion propre à soi même.
La nature de cette projection, sa mise en scène nous donne des indications sur l’essence de la pulsion projetée. Il n’existe pas une jalousie mais des formes multiples de jalousie qui se matérialisent pour notre mari jaloux par des projections de type : infidélité de l’autre à différents degrés, du simple regard porté sur un autre au passage à l’acte en passant par de nombreux autres débordements d’imagination.
Etre deux à s'entendre
Accepter cette idée de projection n’est pas évidente. Le mari jaloux niera cet état de fait, ne peut admettre que ce soient ses propres désirs qu’il approprie à l’autre. Pourtant la démarche ne peut être que stabilisante au niveau du couple. En effet la jalousie est souvent associée au qualificatif “trop”. “Mon mari est trop jaloux, ma femme est trop jalouse, il (elle) me rend la vie impossible”. Et il n’est pas rare d’en arriver à voir des relations se dégrader voire se rompre pour de “la jalousie”.
L’autre, cible ou victime, ne doit pas comprendre dans ses lignes : “ah donc c’est toi qui désire me tromper”, ce qui aggraverait une communication déjà fragile mais plutôt entamer un dialogue. Cette pulsion est par définition inconsciente, on pourrait parler à la limite de pulsion animale que le conscient, l’être dit civilisé, exempt de tout reproche, ne peut maîtriser. Le dialogue permet la réflexion sur soi-même, certes il n’apportera pas les réponses d’un domaine inaccessible mais il permet l’apparition de la tolérance. Savoir ce qui appartient réellement à l’un ou à l’autre est indispensable. Cheminer vers “pourquoi ai-je besoin d’être jaloux ?” puis “pourquoi ai-je ces désirs que j’attribue à l’autre” permettent bien souvent d’améliorer son rapport à l’autre et souvent soulève d’autres questions qui finalement n’avaient aucun rapport avec un “désir d’infidélité”.
On ne peut “aider” quelqu’un si la demande de ne vient pas l’autre. On ne peut être aidé malgré soi. L’homme ou la femme jaloux(se) exprime une angoisse, c’est elle qu’il faut entendre et non pas les mots exprimés qui traduisent d’une manière déformée celle-ci. Car il ne faut pas s’y méprendre, être jaloux fait souffrir l’autre mais surtout celui a besoin de cette projection vers l’être qui lui est le plus cher, l’être aimé, sa raison d’être.