Choix incestueux
Revenons à nos prénoms américains histoire de se détendre un peu. Que répondre à l'enfant dont le prénom est inspiré d'une série américaine : «maman pourquoi je m'appelle John Ross (JR) ?» ou plus fréquemment hélas le prénom d'une héroïne style «les feux de l'amour», ces feuilletons à l'eau de rose qui n'en finissent pas. Il a été montré que ces séries tout comme les parutions du type «harlequin» faisait recette parce qu'elle renvoyait dans l'imaginaire, essentiellement des femmes, à cette partie de l'enfance où le conte de fée structure, à 5 ans l'on croit au prince charmant et puis la personnalité se précise et l'on prend contact avec la réalité. Or lors de dépassement non effectué, à l'âge adulte, certaines femmes continueront cette recherche, iront se rassurer dans cet imaginaire où tout finit bien à la fin. Et quant on sait que le conte de fée est le prolongement du désir incestueux d'avec son père... La démarche est très freudienne, certes, mais en acceptant les différentes phases de l'évolution de l'enfant chez Freud, vers 5 ans environ débute celle de l'oedipe. Sans rentrer dans les détails, demandez à une petite fille avec qui elle se mariera plus tard, à cet âge là elle vous répondra «avec mon papa». Alors qu'une année auparavant c'était sa maman l'élue de son coeur.
Difficile d'entendre et de comprendre cette démarche et ce désir de l'enfant pour nous adulte qui avons traversé les mêmes stades mais qui heureusement ont été enfouis depuis bien longtemps dans notre mémoire. L'enfant désire son père, elle cherche à lui plaire, le séduire. Sa mère devient alors la rivale qu'il faut éliminer. L'enfant parentophage que nous connaissons ira dans le lit de ses parents mais au milieu du couple pour le séparer physiquement. La petite fille doit pouvoir «fantasmer» ses envies, parce que dans la réalité il y a l'interdit de l'inceste. Dans les contes de fée, il est question d'une princesse ou d'une belle jeune femme à qui il arrive des événements que seuls les contes peuvent créer. Dans Blanche Neige par exemple, la «belle-mère» est jalouse de la fille de son mari. Bien évidemment elle cherche à mettre fin à ses jours, y parvient presque sans l'arrivée d'un beau prince qui au travers d'un baiser la ramène à la vie et à l'amour. Idem pour La belle au bois dormant, il est question de long sommeil avant que le prince charmant n'arrive. Est-ce dans cette hibernation forcée que se résout l'oedipe ? Il s'agit toujours au départ d'amours impossibles (Cendrillon, la belle et la bête), tiens comme celui du père ! Puis vient la métamorphose de l'un ou de l'autre qui rend l'amour possible.
Je conseille la lecture de «psychanalyse des contes de fées» de Bruno Bettelheim, sa lecture des contes, aussi originale soit-elle ouvre de nouvelles voies d'éclaircissement.
L'enfant dont son prénom est issu d'un imaginaire incestueux non résolu, que représente-t-il alors réellement pour l'inconscient de sa mère ? Le fruit de son accouplement avec son père ?
Une jeune femme a mis près de 24 heures pour accoucher de son enfant, elle voulait absolument qu'il naisse le jour anniversaire de son père. Habitant à plusieurs centaines de kilomètres de celui-ci, elle est venu vivre en face de chez son père un mois avant la naissance. Un «cadeau» à son père au travers de cet enfant, non comme grand père mais comme père, une façon pour elle de fantasmer cette relation incestueuse. Son père était ainsi symboliquement le père de l'enfant. On dit bien «faire un enfant à...».